Durcissement des frontières : Quid des réfugiés climatiques ?

Satkhira, Bangladesh, March 2022. Photograph: Kazi Salahuddin Razu/NurPhoto/REX/Shutterstock

 

Depuis les 1ères révolutions industrielles, les activités humaines constituent la cause principale des changements climatiques avec pour conséquence notamment le phénomène du déplacement de population. 

 

Lorsqu’on évoque ce phénomène de déplacement de population , on parle alors de réfugiés climatiques. Dès les années 2000, le terme de réfugiés climatiques est utilisé pour parler des migrants environnementaux, à savoir des personnes obligées de quitter leur foyer pour des raisons environnementales (séismes, inondations, ou températures extrêmes.). La plupart des réfugiés climatiques migrent d’abord à l’intérieur de leur pays , on parle alors de migration interne. Cependant, ce n’est pas le cas de tous les migrants environnementaux, puisque certains décident de franchir les frontières afin de migrer dans d’autres pays. 

 

Toutefois, lorsque ces réfugiés franchissent les frontières, ils ne sont pas reconnus aux yeux de la loi. En effet, il n’existe aucun statut international les concernant, ce qui a pour conséquence, l’absence de reconnaissance officielle en tant que réfugié en droit international. Ces migrants environnementaux ne peuvent donc pas demander l’asile et ne jouissent d’aucune sécurité.  

 

Afin d’être reconnu comme étant réfugié selon la Convention de Genève de 1951 relative aux statuts des réfugiés, il faut connaître des facteurs de persécutions bien précis tels que la persécution religieuse, nationale, sociale, raciale ou encore politique. Le principe fondamental de cette Convention est le non refoulement, selon lequel un réfugié ne devrait pas être renvoyé dans un pays où sa vie ou sa liberté sont gravement menacées. Ceci est désormais considéré comme une règle du droit international coutumier. Néanmoins, cette Convention de 1951 exclut la situation environnementale comme facteur de persécution. 

 

Ioane Teitiota, originaire des îles Kiribati (État insulaire d’Océanie menacé par la montée des eaux), est la première personne à avoir demandé le statut de « réfugié climatique » à la justice néo-zélandaise en 2007. Sa demande étant rejetée, il a donc eu recours au Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU en 2016 qui a également refusé sa demande. Cependant, le Conseil reconnaît que les changements climatiques sont une vraie menace pour les droits de l’homme.

 

Les déplacements de population sont considérables dans trois régions du monde en particulier : l’Afrique Subsaharienne, l’Asie du Sud et l’Amérique Latine. Ces régions comportent de nombreux pays en développement et selon un rapport de l’ONU en 2020, 70% des pays les plus vulnérables aux changements climatiques sont également parmi les plus fragiles sur le plan politique et économique. Ces trois régions menacées connaissent une augmentation de leur population chaque année et des conséquences climatiques déplorables, ce qui se traduit donc par de fortes migrations internes. 

 

Alors comment venir en aide aux migrants environnementaux, dès lors qu’ils ne sont pas reconnus par le droit international et ne jouissent donc d’aucun droit ? 

 

L’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) fondée en 1951, est la principale agence intergouvernementale chargée des migrations et, est en première ligne des efforts opérationnels, de recherche, de politique et de sensibilisation, avec pour objectif de placer la migration environnementale au cœur des préoccupations internationales, régionales et nationales. 

 

En prévision de la 26e Conférence des Parties des Nations Unies sur les changements climatiques (COP26), l'OIM avait dévoilé sa nouvelle Stratégie sur la migration, l'environnement et les changements climatiques 2021-2030. La stratégie décrit comment l'OIM soutiendra les États afin d’aider et de protéger les personnes touchées par les effets des changements climatiques.

 

Toutefois, la question des migrations environnementales reste toujours d’actualité. Il y avait 184 millions de déplacés entre 2008 et 2015 et avec le réchauffement climatique et le nombre de la population qui augmente, ce phénomène n’est pas prêt de s’arrêter. Selon un rapport en 2021 de la Banque mondiale, 216 millions de personnes pourraient se déplacer à l’intérieur de leur propre pays d’ici 2050.

 

Il convient également de préciser que ces déplacements de réfugiés ne représentent qu’une infime partie des populations touchées par ces phénomènes climatiques. Ainsi, l’Afrique subsaharienne, une des régions les plus touchées par les conséquences climatiques, concentre 18 des 21 pays les plus pauvres du monde. En clair, la question des réfugiés est déjà centrale dans le débat climatique, mais quid des oubliés ? Quid de ceux qui n’ont pas la possibilité de se réfugier, comme le définit si bien le droit international ? 

 

D’autant plus que personne n’ignore à quel point les tentatives de rejoindre l’Europe par le biais de passeurs cupides est extrêmement dangereuse. Face à des flux certains de réfugiés climatiques vers l’Europe dans les années à venir, quelle politique migratoire adopteront nos dirigeants ? 

 

Dans une Europe qui tend à fermer ses frontières, le réchauffement climatique peut-il les forcer ? 

 

Marie Leissner 

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