Robert Badinter, un homme multiple

 

Crédits : Zeleb France

Qui est-il ? 

 

Né le 30 mars 1928 à Paris, fils d’immigré de Bessarabie (vers l’actuelle Moldavie), Robert Badinter s'est hissé parmi les monuments de la politique française. 

 

Mort le 9 février dernier à 95 ans, cet homme, à la fois avocat, sénateur, ministre, écrivain et grand activiste a refusé la légion d’honneur et l’ordre national du mérite. 

Il est devenu une figure incontournable des droits de l’homme.



Liens avec la Shoah :

 

Sa famille, juive, s’installe à Lyon pendant la guerre pour être en zone libre. Cependant, le 9 février 1943, son père est arrêté avec 85 autres juifs lors de la rafle de la rue sainte Catherine. Déporté à Drancy puis à Auschwitz où il meurt, il fut l’une des 6 millions de victimes de la Shoah. Âgé de seulement 15 ans au moment de l’arrestation de son père, Robert Badinter est donc personnellement marqué par la seconde guerre mondiale.

 

Tout au long de sa vie, il s’assure que la mémoire des victimes de la Shoah soit respectée. Pour cela, il attaque en justice le négationniste Robert Faurisson en 1981 et se positionne fermement contre la libération de Maurice Papon en 2001.

 

De la même manière, lorsqu’en 1992, il rend hommage aux victimes de la rafle du Vel d’Hiv avec François Mitterrand et que la foule commence à siffler ce dernier, lui reprochant ses liens avec le régime de Vichy, il s'emporte. Il prononce alors ce discours improvisé, plein d’émotions “Vous m'avez fait honte en pensant à ce qui s'est passé là ! Vous m'avez fait honte ! Il y a des moments où il est dit dans la Parole : « Les morts vous écoutent ». Croyez vous qu'ils écoutent ça ?”

 

Travail dans le droit

 

Au- delà du grand activiste qu’il est, Robert Badinter est aussi un avocat de renom. Travaillant d’abord dans le droit public, il se fait remarquer via des affaires pénales, plus médiatisées. 

 

En tant que ministre de la justice, il met en place en 1985 une loi permettant une indemnisation plus facile des victimes des accidents de la circulation.

 

Il devient président du conseil constitutionnel en 1986. Sa présidence est notamment marquée par l’annulation de 8 lois Pasqua-Debré dont le but est de réguler l’immigration.

Enfin, dans un ouvrage en 2015, il plaide pour la réforme du code du travail.

 

Dépénalisation homosexualité 

 

si son combat le plus connu est celui contre la peine de mort, robert Badinter participe aussi à la mise en place la dépénalisation de l’homosexualité. 

 

Cette dépénalisation faisait partie des promesses de campagne de Mitterrand. aidé de Gisèle Halimi, il soutient le député Raymond Forni qui propose la loi du 4 août 1982. Cette loi abroge l’alinéa 2 de l’article 331 du code pénal, créé par le régime de Vichy qui sanctionnait spécifiquement les relations homosexuelles. Cette abrogation a permis d’enlever les inégalités existants entre le consentement hétérosexuel et homosexuel.

 

Peine de mort : 

 

Touché par le sort de Roger Bontems, complice de meurtre durant une prise d’otage et condamné à mort en 1972, Robert Badinter place la lutte contre la peine de mort au cœur de son engagement principal.

 

En 1977, sa plaidoirie empêchant la condamnation à mort de Patrick henry (jugé pour avoir tué un enfant) lance un débat sur la nécessité de la peine de mort en France. en 1973, il écrit “l'exécution” et avec ses talents d’orateur, empêche 5 condamnés d’accéder à la peine de mort.

 

Malgré une opinion publique qui lui est assez hostile, (¾ des français sont en faveur de la peine de mort et on le surnomme “le ministre des assassins) le 17 septembre 1981 dans un discours devenu mythique, il propose la loi qui sera promulguée 9 octobre de la même année abolissant la peine de mort. il déclare alors “la justice française ne sera plus une justice qui tue”

 

Carrière politique

 

Robert Badinter à été, dès sa jeunesse (où il est fan de pierre Mendès France) très proche du Parti socialiste. il participe aux deux campagnes électorales de François Mitterrand, dont il devient ministre en 1981 : il est garde des sceaux du 2ème gouvernement de Pierre Mauroy et du 1er gouvernement de Laurent Fabius

 

Il tente d'être élu aux élections législatives 1967 et de 1973 mais ces élections se soldent par des échecs : il ne parvient pas au poste de député. Il occupe cependant le poste de sénateur de mars 1995 à septembre 2004, soit durant deux mandats.

 

Artiste : 

 

Robert Badinter ne se limite pas à être un homme politique, il s'est aussi mis au service de l’art en écrivant une pièce de théâtre, un opéra et un livre de non fiction. 

 

En effet, en 1995, Robert Badinter publie ‘’C.3.3”, une pièce de théâtre sur Oscar Wilde et sa condamnation pour homosexualité. En 2013, Badinter ressort sa plume pour écrire Claude, un opéra inspiré de la nouvelle Claude Gueux de Victor Hugo qui met en scène l’histoire d’amour tragique d’un canut arrêté lors d’une manifestation et d’un autre prisonnier. Enfin, en 2019 il publie “Idiss”, un livre retraçant l’histoire de sa grand-mère .

 

Une action internationale : 

 

La renommée de l’ancien ministre ne s'arrête pas en France puisqu’il a aussi œuvré pour d’autres pays : ainsi, en 1991, il participe à l'élaboration de la Constitution de la Roumanie

 

En 1991, il devient président de la Commission d'arbitrage pour la paix en Yougoslavie, créée par la CEE et surnommée « Commission Badinter ». Cette commission permet de donner des conseils juridiques à la conférence européenne de paix en Yougoslavie suite aux massacres qui se déroulaient.

 

Robert Badinter noue aussi un lien spécial avec le dalaï-lama, dont il est un fervent admirateur. à multiples occasions, il critique ce qu’il qualifie de “génocide culturel” subit par la tibet et loue la résistance non violente tibétaine.

 

Controverses

 

Au-delà de son immense travail, Robert Badinter reste un humain qui n’a pas sa langue dans sa poche et dont l’opinion polarise parfois le débat public. C’est par exemple le cas lors de l’arrestation de Dominique Strauss-Kahn pour tentative de viol ou il s’indigne de “la mise à mort médiatique” subie par l’ancien directeur du FMI, il critique aussi “la sacralisation de la parole des victimes” dans le domaine des agressions sexuelles.

 

De la même manière, il critique fortement l'exécution de Saddam Hussein, qu’il qualifie de “faute politique majeure”.

 

Robert Badinter meurt le 9 février 2024, 81 ans jour pour jour après l’arrestation de son père, le 9 février 1943. Il laisse derrière lui ses riches et multiples contributions à l’élaboration d’une société plus saine. Tâchons de nous en montrer dignes. 

 

Lou Pouthie

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