La fracture israélo-palestinienne en France

Le 19 et le 23 avril, Rima Hassan, 7e sur la liste européenne de La France Insoumise, et Mathilde Panot, député LFI, ont été convoquées pour apologie du terrorisme. Une convocation qui tombe pile en pleine campagne européenne, pour des positions prises il y a plusieurs mois.
De l’autre bord politique, de nombreux soutiens politiques à Israël n’écopent d’aucun frein
dans cette campagne électorale. Pourtant, certains comme Meyer Habib ou Rachel Khan,
ont, sans aucun doute, franchi des barrières éthiques et morales.Tandis que le premier traitait les gazaouis de « cancer », la seconde ironisait sur le « summer body » de Palestiniens entassés sur une plage.
D’une part, la défense de l’autodétermination du peuple Palestinien, et d’autre part, la préservation du droit de défense israélien. Deux positions défendues avec beaucoup de vigueur et de passion. Parfois trop.
Le journal Le Monde précisait ainsi : « En faisant de Gaza l’axe principal de sa campagne pour les européennes, M. Mélenchon, qui rêve de conquérir le vote des quartiers populaires, a radicalisé ses positions à mesure que le conflit se durcissait ».
Au-delà des quartiers populaires, c’est une véritable mobilisation étudiante qui ressort de
cette position.
Toutefois, cette stratégie véhémente semble, pour l’instant, ne pas porter ses fruits au vu des sondages qui créditent LFI de moins de 10%. Au contraire, à l’opposé de l’échiquier politique, la liste portée par Jordan Bardella compte près du triple d’intention de votes. Tandis que LFI défend -par intérêt ou par conviction- la cause palestinienne, le Rassemblement National reste en retrait, passif.
Un soutien discret à Israël, mais surtout une attaque répétée envers La France Insoumise sur ses positions vis-à-vis du conflit. En somme, une différence dans la stratégie électorale, et plus largement, dans le comportement des leaders face à cette crise. Et c’est bien Jordan Bardella qui semble remporter cette bataille stratégique contre une France insoumise en perte de vitesse, voire d’identité. Il est, de façon évidente, plus facile pour le Rassemblement National d’attaquer La France Insoumise sur ses positions, que de défendre la sienne -passive- de manière acerbe.
Aujourd’hui, cette bataille électorale donne un avantage considérable à l’extrême droite. Et ce, notamment lorsque le leader de la France Insoumise, Jean Luc Mélenchon, compare le président de l’université de Lille à un nazi. Une perte de crédibilité importante dans une bataille électorale qui fait rage.
D’un autre côté, le front présidentiel ou la liste socialiste de Glucksmann se font beaucoup plus discrets sur ce sujet. Et face à la tourmente de LFI, c’est Glucksmann qui semble rallier les anciens mélenchonistes et nostalgiques d’une gauche forte.
Plus largement, ce clivage politique reflète en réalité un clivage sociétal qui ne disparaîtra pas tant que cette région du Moyen-Orient baignera dans le sang.
Plus qu’un clivage, c’est une fracture qui se dessine, notamment avec la mobilisation importante de la jeunesse militante.
Des étudiants de Science Po ont ainsi occupé un amphithéâtre de manière illégale en soutien à Gaza, tandis que d’autres étudiants militaient pour la réouverture de l’établissement en brandissant des pancartes exigeant une solution à deux Etats. Mais ils ne sont pas seuls à faire entendre leur voix, les membres de Dauphine-Palestine ou d’autres associations mettent en avant une lutte, un combat. Que ce soit un pays ou un établissement, le résultat est le même : la scission politique, le schisme idéologique se font ressentir.
Mais au-delà des étudiants, c’est tout une classe d’âge qui se mobilise, et qui s’intéresse à un conflit dont même les plus grands historiens ne maîtrisent pas tous les secrets. Plus qu’une guerre idéologique, c’est malheureusement une guerre de l’information qui s’importe en France. Une guerre d’information qui excite les passions et encourage le déversement de haine sur le camp adverse, sans laisser de place au débat.
Dans la rue aussi les tensions montent, les manifestations se font de plus en plus nombreuses et les militants refusent de céder ne serait-ce qu’une parcelle de terrain aux forces de l’ordre.
En effet, certains voient en l’interdiction de manifestation par ces représentants de l’autorité centrale une répression démocratique, une atteinte au pluralisme idéologique, voire pire, une mainmise d’un puissant lobby sioniste sur le ministère de l’Intérieur !
C’est dans ce contexte tendu qu’a été annulée la conférence de Jean-Luc Mélenchon et Rima Hassan à Lille, laquelle était organisée par le collectif Libre Palestine, dont le logo nie l’existence d’Israël.
Face à cette annulation, Jean Luc-Mélenchon dénonçait un “abus de pouvoir de république bananière” en pleine campagne électorale. Une scission idéologique en somme.
Le débat politique se voit, pour la première fois depuis longtemps, projeté directement sur le militantisme des citoyens.
La France se divise, certes, mais jusqu'où ? Lorsque la fissure deviendra crevasse,
comment se refermera-t-elle ?
Eliot Senegas.
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