Le beau rôle : Un amour à réinventer

 

 

Dans son premier long-métrage “Le Beau rôle”  Victor Rodenbach explore l'intimité et les fractures d’un couple fusionnel avec une délicate acuité. Nora et Henri, sont inséparables dans la vie comme au travail, elle, est metteuse en scène et lui, est comédien. Ils semblent former un duo indissociable mais leur complicité sublime vacille lorsque Henri décroche un rôle au cinéma. En quittant la pièce de théâtre de Nora, c’est elle qu’il semble abandonner. Le couple est alors confronté à une question cruciale : peut-on s’aimer sans s’appartenir totalement dans une relation où la fusion est une évidence ?

 

Entre humour et réflexions sérieuses, Rodenbach signe une comédie romantique de remariage qui questionne l’amour à l’épreuve du changement, de la distance et des conflits. Par l’opposition symbolique du théâtre et du cinéma, il esquisse une subtile métaphore sur les compromis nécessaires aux relations. Henri et Nora incarnent avec brio ces dilemmes, portés par une alchimie remarquable et une écriture à la fois tendre et réaliste.

 

Les petits détails, comme Henri qui reprend la cigarette une fois libéré de l'influence de Nora, révèlent le corollaire de cette relation si fusionnelle : derrière l'apparente idylle se cache une certaine forme d’oppression. Rodenbach dévoile ainsi avec finesse la dualité de ces relations idéalisées, bien souvent à la fois exaltantes et étouffantes. En parallèle, il interroge la compatibilité des différences au sein du couple, montrant que désaccords et évolutions personnelles ne condamnent pas nécessairement l’amour, mais peuvent parfois le redéfinir

 

Cependant, si le duo principal est magnifiquement développé, les personnages secondaires manquent de profondeur malgré des interprétations justes. On ne comprend pas bien les intentions de Lou, par exemple, (Pauline Bayle) qui se dresse en confidente touchante auprès de Henri mais dont les confessions sont vite laissées de côté au fur et à mesure du film. Le développement du haut en couleur François, interprété par l’excellent Jérémie Laheurte semble aussi nous laisser sur notre faim.

 

Il est d’abord dressé en ami prodigieux, charmant et séducteur, accompagnant  Henri dans sa découverte du monde merveilleux du cinéma parisien. Puis il se révèle plus sombre, et apparaît comme un rival sans scrupule. Cette facette pourtant très intéressante est peu détaillée, si bien qu’on reste déçu et sans réponse quant à l’attitude du personnage. 

 

En dépit de ce léger bémol, le film séduit par son ton sincère, sa fraîcheur et son hommage sensible à la vie des comédiens de théâtre.  Il aborde l’univers si particulier du théâtre de province pour offrir un regard sincère sur la réalité méconnue du métier de comédien, avec ses luttes discrètes et son intense camaraderie. Quelle est la réalité de ces artistes qui exercent en dehors de la capitale ? Comment abordent-ils les problématiques notamment financières dans des villes ou la culture est moins consacrée qu’à Paris?

 

 Avec 80 minutes bien rythmées entre rires, larmes et remise en question, Le beau rôle est la comédie romantique de fin d’année à ne pas louper !