Le wisconsin, le Swing State le plus emblématique du Nord des États Unis

 

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Un swing state - littéralement Etat pivot-, est un État bascule, dans lequel le résultat de l’élection est encore incertain entre les deux candidats aux présidentielles. Ils sont au nombre de 7 cette année, et ce sont eux qui déterminent le résultat final de l’élection.

 

Aujourd’hui, Orasi revient sur le Wisconsin pour analyser sa culture, son passé, et surtout, son avenir.

 

Retour sur les dernières élections

 

Au premier regard, cet État ne semble pas répondre aux exigences d’Etat bascule que l’on attend généralement de ces Swing States, puisque le Wisconsin n’a voté qu’une seule fois pour un candidat républicain entre 1988 et 2020 (Trump en 2016). Mais en réalité, si les présidentielles semblent localement marquées d’une étiquette démocrate, le Wisconsin fait partie de ces États imprévisibles jusqu’au dépouillement de la dernière voix.

 

Ses 10 grands électeurs sont ainsi jalousement disputés par Kamala Harris et Donald Trump, qui enchaînent les slogans et discours marquants lors de leurs visites respectives.

 

“And I promise we will make Wisconsin great again,” déclarait ainsi l’ancien président Donald Trump le 16 juillet à la convention républicaine de Milwaukee, tandis que la candidate démocrate assénait “The path to the White House goes through Wisconsin,” le 23 juillet lors d’un discours à West Allis.

 

En 2008, le Wisconsin se rangeait derrière la candidature de Barack Obama, faisant de lui le premier président noir des Etats-Unis face à John McCain. Volteface en 2010, lorsque l’Etat décide d’élire les Républicains Scott Walker et Ron Johnson comme gouverneur et sénateur. Mais alors que la tendance est au conservatisme, les électeurs décident de renouveler leur confiance envers Barack Obama en 2012, tout en élisant le démocrate Tammy Baldwin au sénat. Puis nouvelle désillusion pour les démocrates en 2014 alors que Scott Walker est réinvesti gouverneur, ainsi qu’en 2016, lorsque l’Etat décide pour la première fois depuis 1984 de voter pour un président issu du rang des républicains. Enfin, c’est Joe Biden qui devance Trump dans les urnes en 2020, avant de voir le démocrate Tony Eversun être élu en qualité de gouverneur en 2022 et le Républicain Ron Johnson au Sénat la même année.

 

Si Barack Obama était titulaire d’une grande popularité dans cet État, ce n’est pas le cas de tous les autres candidats, qui ont eu à se frotter à l’incertitude des wisconsinois au XXIe siècle. Ainsi, ce sont 0,7 points qui séparaient Joe Biden de Donald Trump en 2020, mais également Donald Trump et Hillary Clinton en 2016. En 2004, John Kerry l’emportait de 0,4 points sur Georges W. Bush, lequel avait déjà été défait de 0,2 points 4 ans plus tôt par le démocrate Al Gore.

 

II. Les raisons qui font du Wisconsin un Swing State

 

Si certains États ont un ancrage partisan très fort, le Wisconsin est connu pour prioriser davantage les problématiques sociétales actuelles (économie, éducation, santé) plutôt que les partis politiques. Cette donnée fait du Wisconsin un État pivot, déterminant dans la course à la maison blanche et surtout, un État largement imprévisible dans les différents scrutins nationaux. Si les deux candidats s’arrachent autant cet État, c’est aussi une conséquence des derniers scrutins présidentiels en date : il était synonyme de victoire pour le candidat qui l’emportait ici lors des 4 dernières élections présidentielles.

 

Mais la particularité de cet État transcende cette simple superstition.

 

En effet, si cet État est aussi spécifique, c’est notamment en raison de sa très faible diversité (uniquement 8% d’hispaniques, et 6.6% d’afro-américains), conduisant les candidats à prioriser un discours qui s’adresse aux “white working-class voters” selon l'expression de US NEWS. Cette classe travailliste est ainsi la clé de la victoire pour les deux candidats, notamment depuis l'important déclin d'industries nationales au Wisconsin (comme la fabrication) au sein des zones industrielles et rurales de l’Etat.

 

C’est notamment en jouant sur cette préoccupation majeure que l'ancien président Républicain avait réussi à glaner la première victoire républicaine aux présidentielles en depuis la fin du XXe siècle.

 

En clair, un sondage réalisé par Emerson College Polling & The Hill démontre que l'économie était la préoccupation principale lors de ces élections pour ⅓ des électeurs de l’Etat.

 

III. Comment l’emporter ?

 

Face à ces revendications économiques populaires, s’affrontent deux visions drastiquement différentes de l’économie. Harris qui se revendique elle-même capitaliste, reprend la doctrine de l’actuel président des Etats-Unis, prônant une augmentation des taxes pour les plus grosses entreprises.

 

De l’autre côté, Trump revendique une baisse de taxes pour ces plus grosses entreprises, tout en voulant augmenter celles sur les taxes de produits importés. Cette idée a largement pesé dans la balance en s’insérant dans un discours de réindustrialisation face à la concurrence déloyale des autres Etats (notamment la Chine).

 

Si les discours économiques sont assez larges et ne s’appliquent pas nécessairement aux situations inhérentes à chaque Etat, la stratégie diffère quant aux secteurs stratégiques ciblés par les équipes de campagne des deux adversaires.

 

Ainsi, Michael Wagner, directeur du CCCR (Center for Communication and Civic Renewal) à l’université de Wisconsin située à Madison analysait pour la BBC les stratégies électorales territoriales victorieuses pour chaque candidat.

 

Du côté démocrate, maximiser la participation dans la capitale Madison et dans le Milwaukee, tout en conservant ses votes chez les ruraux, pourrait être la clé pour la victoire de Kamala Harris. Au contraire, Trump a tout intérêt à capter le maximum de voix possibles dans les banlieues, mais également dans la zone WOW (Waukesha, Ozaukee et Washington). C’est cette possibilité pour le candidat républicain d’avoir plus de votes issus des WOW que Harris n’en obtiendra dans les comtés de Milwaukee et de Dane, qui sera déterminant dans le résultat final des élections.

 

IV. Les pronostics

 

Alors que les sondages placent Kamala Harris en tête au Wisconsin depuis plusieurs semaines, chaque jour rapproche les courbes du point d’inflexion favorable aux Républicains. Cette montée en puissance inéluctable de Trump dans cet État dans les sondages fait également échos à l’habituelle surestimation des démocrates dans les sondages du Wisconsin.

 

Si les pronostics donnent presque 50/50, il semble que Harris ait plus de mal que Trump à convaincre sur les questions économiques dans ce Swing State, dont la bascule penchera sûrement du côté Républicain dans les prochains jours.

Affaire à suivre.

 

Eliot Senegas

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