Arizona: une élection plus contestée que jamais

« Je vais aller faire quelque chose qui aurait dû être fait il y a longtemps ».
Cette phrase prononcée ce jeudi 24 octobre par Joe Biden a peut-être marqué un tournant dans cette élection présidentielle états-unienne annoncée plus serrée que jamais entre le candidat Républicain Donald Trump et la Démocrate Kamala Harris. L’actuel président américain a en effet effectué une visite historique en Arizona afin de présenter les excuses des Etats-Unis au peuple amérindien « les Navajos » pour la première fois de son histoire. A quelques jours de cette élection imprévisible, les 2 partis politiques redoublent d’effort pour faire basculer le vote des derniers électeurs indécis en leur faveur, ce qui pourra faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre.
Cet effort de dernière minute est porté essentiellement sur les 7 « swing-states » de ces élections, qui sont des Etats ou le résultat est indécis entre les 2 candidats et donc la victoire ferait basculer le résultat. Historiquement bastion électoral du parti républicain, l’Arizona a vu en 2020 Joe Biden arriver en tête pour seulement 10 500 voix d’avance.
I. Des électeurs traumatisés par l’élection de 2020
A la suite du résultat de la dernière élection présidentielle, Donald Trump avait refusé de reconnaitre sa défaite en Arizona, état d’esprit partagé par de nombreux électeurs républicains. Bien que les vérifications nécessaires aient été faites pour la confirmation de la victoire électoral du candidat démocrate, Donald Trump est encore aujourd’hui dans un déni démocratique refusant de reconnaitre sa défaite et criant au complot. Influencé par la pensée de leur leader, de nombreux républicains se sont donc sentis trahis par le « vol » de cette élection, perdant complètement confiance au système américain.
Seulement 47% des électeurs républicains pensent que le vote de ce 4 novembre se déroulera dans de bonne condition sans triche, soit plus d’un électeur sur deux pensant que le résultat obtenu ne sera pas le reflet de la volonté des électeurs.
Cette déviance envers les institutions démocratiques pose un réel problème, l’Etat Arizonien essaye donc de lutter contre ce phénomène de plus en plus présent. Dans la ville de Phoenix, un tout nouveau bâtiment spécialement dédié pour les élections a été mise en place et autorise la visite de spectateurs au cours de l’année afin de leur montrer le processus du dépouillement électoral en expliquant le procédé du début à la fin.
Cette mesure phare accompagnée d’autres petites mesures redonnent petit à petit foi au système électoral, c’est ce que considère l’universitaire Thom Reilly qui trouve que ces mesures ont un impact « considérable sur les sceptiques et sur les citoyens qui ne comprennent pas le processus électoral ». Nous pouvons donc espérer que le résultat de l’élection à venir ne sera pas source de conflit et accepté par les 2 partis.
II. Les thématiques présidentielles ayant une place prépondérante dans la société
Bien que de nombreuses thématiques soient abordées durant cette élection, 2 très importantes ressortent à chaque fois, ce sont le droit à l’avortement et l’immigration.
Concernant le droit à l’avortement, l’Arizona s’était positionné pour son interdiction en 2022 suite à l’abrogation de la décision Roe v. Wade par la Cour suprême. Kamala Harris se dit être la candidate du droit à l’avortement au sein de l’ensemble du territoire américain et fait de cette cause un thème majeur de sa campagne.
Cela porte ses fruits puisque de nombreux électeurs se disent prêt à voter Démocrate uniquement vis-à-vis de cette promesse de campagne sans chercher à aller plus loin. Se sentant de plus en plus menacé, Donald Trump essaye de tempérer sa position sur le droit à l’IVG, et a même mis la pression sur le Congrès Arizonien afin qu’il légifère sur le droit à l’IVG, le rendant possible jusqu’à 15 semaines de gestation dans cet Etat, décision prise en avril 2024.
Le débat sur l’IVG est plus que d’actualité en Arizona et pourrait jouer en la faveur de la candidate démocrate. En effet, certains collectifs féministes font du porte à porte depuis de nombreuses semaines pour essayer de récolter des signatures afin de soumettre par référendum le droit à l’IVG dans la constitution. En faisant cela, ces collectifs sensibilisent et rendent visible ce combat soutenu par Kamala Harris, lui permettant alors potentiellement d’acquérir de nouvelles voies récupérées par le démarchage de ces collectifs féministes.
Une autre thématique prépondérante dans la campagne électorale est la question migratoire, d’autant plus en Arizona qui est directement concerné par sa situation géographique. Les arizoniens mettent en avant le sujet migratoire comme l’une des causes principales qui déterminera leur vote. L’opinion public tend au cours de ces dernières années à se rapprocher de plus en plus de la droite et du camp républicain.
Ce phénomène a poussé la Maison Blanche à adopter un virage sécuritaire au mois de Juin en autorisant par décret présidentiel l’arrêt quasi-total de demandeur d’asile se présentant spontanément sur le territoire et de les renvoyer directement hors du territoire américain.
Cette décision a eu des impacts directs sur le territoire arizonien avec par exemple « Lukeville » qui était le principal point de passage des migrants souhaitant arriver aux Etats-Unis. Cette ville est désormais déserte depuis quelques mois, plus aucun passeur ne s’y aventure laissant une impression de ville fantôme.
III. Les navajos pouvant faire basculer le scrutin du côté démocrate
Les navajos sont un peuple amérindien représentant près de 6% de la population arizonienne. Ils peuvent avoir un impact majeur sur le résultat de ce 4 novembre lorsque l’on sait à quel point celui-ci sera serré. En effet, bien qu’ayant la nationalité états-unienne depuis 100 ans, les Navajos participent que très faiblement aux scrutins électoraux de par de nombreuses difficultés matérielles, certains se trouvent à plus de 2 heures du bureau de vote le plus proche, ainsi qu’on obstacle moral important, ne se sentant pas forcément représenté par les différents candidats se présentant.
Ainsi, si une mobilisation massive de Navajos s’effectue ce 4 novembre, elle pourrait complètement changer le résultat de l’élection puisqu’ils constituent une importante réserve de voix pour le camp démocrate. Et cette forte mobilisation n’est pas si utopique que ce que l’on pourrait penser. En effet, l’implication politique de cette population est de plus en plus importante au fil des années, mais c’est surtout leur haine envers Donald Trump qui pourrait les pousser à se mobiliser. En 2017, Donald Trump avait autorisé l’extraction d’uranium sur des terres protégées auxquelles les Navajos étaient très attachées.
Cette décision couplée à un sentiment de mépris du candidat républicain va les entrainer de plus en plus fortement sur le champ politique. On peut voir des affiches un peu partout dans leurs lieux d’habitation les encourageant à aller voter, leur expliquant le processus.
La volonté de peser sur la prochaine élection est donc réellement la mais elle fait face aux difficultés matérielles, administratives évoquées précédemment. Ainsi, les Navajos détiennent peut être entre leurs mains le résultat de ce 4 novembre pour l’Etat Arizonien.
Gabin
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